Les interventions en séance

Outre-mer
Jacqueline Gourault 31/05/2011

«Projet de loi sur le fonctionnement des institutions de la Polynésie française»

Mme Jacqueline Gourault

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si l’on a longuement débattu de la réforme des collectivités territoriales en métropole, réforme dans laquelle je me suis beaucoup investie, il est à mon sens important de ne pas oublier les collectivités plus éloignées comme la Polynésie. En effet, les Français de Polynésie ont beau être éloignés géographiquement de notre assemblée et de notre territoire métropolitain, ils suivent de très près le travail parlementaire que nous effectuons. Aujourd’hui, leur collectivité souffre d’une forte instabilité politique qui nuit dangereusement au fonctionnement de leurs institutions et à leur situation économique et sociale, comme cela a déjà été rappelé. Il me semble donc important, pour ne pas dire primordial pour la Polynésie de retrouver un équilibre institutionnel avec une majorité stable à l’assemblée de Polynésie française. Tel est l’objet du projet de loi organique que nous examinons aujourd’hui. Je commencerai par féliciter, pour le travail qui a été accompli, la commission et son rapporteur, Christian Cointat, dont je salue également les qualités d’écoute, liées à une très bonne connaissance de la Polynésie. Plusieurs amendements ont été adoptés en commission des lois qui améliorent considérablement à notre sens, madame la ministre, le texte initial. Certaines de ces dispositions devraient enfin permettre aux institutions polynésiennes de retrouver une stabilité. Je pense notamment à l’instauration d’une circonscription unique, divisée en huit sections, qui permettra à chaque liste, qui devra se présenter sur l’ensemble des sections, de proposer un projet pour l’ensemble du pays. Cela devrait contribuer à renforcer le sentiment d’unité de la Polynésie tout en garantissant la diversité de la représentation. Une majorité devrait se dégager puisque la prime majoritaire d’un tiers des sièges, soit dix-neuf sièges, sera attribuée à la liste qui remportera l’élection à l’échelle du pays. Toutefois, il est un point sur lequel je souhaiterais attirer votre attention, point crucial pour le pluralisme, qui, vous le savez, est une valeur qui me tient particulièrement à cœur. Il s’agit du seuil d’accessibilité au second tour pour l’élection des représentants de l’assemblée de Polynésie, qui est fixé à 10 % des électeurs inscrits. Il me semble essentiel de modifier cette disposition si l’on veut que le pluralisme puisse s’exercer aussi en Polynésie. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement à l’article 2 qui vise à modifier le seuil d’accessibilité en le portant à 10 % des suffrages exprimés. Cela se justifie d’autant plus que le texte initial intègre des composants très majoritaires, voire trop majoritaires, devrais-je dire, d’un scrutin. On a en effet une circonscription unique et une prime majoritaire égale à un tiers des sièges. En introduisant un seuil de 10 % des suffrages exprimés, on rétablirait un certain équilibre, en sauvegardant le pluralisme et permettant aux petites formations de survivre et de pouvoir être représentées et écoutées.Je rappelle d’ailleurs qu’aucune loi électorale régissant un scrutin de liste à deux tours ne dispose à ce jour que le seuil d’accessibilité au second tour doit être égal à 10 % des électeurs inscrits. Pour les élections des conseils municipaux, le seuil est fixé à 10 % des suffrages exprimés et pour l’élection des conseillers à l’assemblée de Corse, il est fixé à 7 % des suffrages exprimés. En outre, un seuil de 10 % des inscrits peut aboutir, en fonction de l’abstention, à un seuil voisin de 20 % des suffrages exprimés, ce qui est loin d’être négligeable. Bien sûr, nous avons examiné ce point en commission des lois ce matin, et ma proposition n’a pas, je dois le dire, reçu un accueil favorable. Je n’oublie pas que notre collègue µRichard Tuheiava a, quant à lui, déposé un amendement qui fixe le seuil d’accessibilité à 12,5 % des suffrages exprimés, ce qui est un progrès par rapport au texte actuel ; nous verrons, au cours de la discussion, comment concilier nos positions.  Comme l’a dit à plusieurs reprises le président de la commission des lois, il faut veiller à la stabilité, mais je suis de ceux qui pensent qu’on ne peut arguer de l’instabilité pour effacer le pluralisme. Pluralisme et stabilité peuvent toujours se conjuguer. Cela dit, à moins d’un bouleversement majeur du travail de la commission des lois, nous voterons très certainement ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l’UMP et du groupe socialiste.)