Les interventions en séance

Affaires sociales
Jean-Marie Vanlerenberghe 29/11/2012

«Projet de loi de financement de la sécurité sociale»

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici de nouveau réunis pour l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Or, depuis deux semaines, c’est-à-dire depuis que le Sénat a rejeté le volet recettes du présent texte, rien ne semble avoir changé. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, nos débats ne devraient pas s’éterniser. Ces causes, quelles sont-elles ? À nos yeux, la réponse est simple et tient en quelques mots : une absence de cap et de calendrier. En première lecture, nous avons eu l’occasion de dire que, selon nous, tout n’était évidemment pas mauvais dans ce texte ; loin de là, même. Depuis le déficit abyssal de 2008, les soldes sociaux s’améliorent d’année en année. Ce PLFSS s’inscrit, comme les précédents, dans cette dynamique. Pour la deuxième année successive, l’ONDAM sera respecté. Par ailleurs, nous avons salué un certain nombre de mesures ponctuelles, relatives, notamment, à la permanence des soins, au transport des patients, au parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d’autonomie, ou bien encore à la suppression de la convergence tarifaire intersectorielle, même si nous préférerions la suspension à la suppression, ce qui recueillait, d’ailleurs, l’avis unanime de la MECSS, la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale. Madame la ministre, en l’absence de cap, quelles que soient les mesures prises, nous ne saurons jamais quel est votre plan pour atteindre l’objectif de réduction des déficits et celui de remboursement de la dette accumulée, l’un n’allant pas sans l’autre, compte tenu de l’ampleur de cette dernière. Le Gouvernement a-t-il fixé un calendrier de retour à l’équilibre des comptes sociaux ? Nous n’avons toujours pas de réponse à cette question, qui est pourtant la seule vraiment essentielle. Nous craignons qu’en réalité un tel plan n’existe pas encore pour l’instant et que vous n’ayez toujours pas choisi, d’autant que vous n’avez pas de majorité pour trancher, entre deux voies devenues inconciliables : la première, visiblement, étant celle du rafistolage d’un système qui n’est plus adapté, la seconde, celle des réformes structurelles. C’est cette absence de choix que reflète parfaitement le volet recettes de votre PLFSS. Vous vous réjouissez, monsieur le rapporteur général, de la réduction des niches sociales. Nous ne nous opposons pas à un effort d’équité, à condition que le ciblage choisi soit juste. Ainsi, nous sommes contre le déplafonnement brutal des cotisations maladie des travailleurs indépendants non agricoles, qui touchera de plein fouet les petits commerçants et artisans, lesquels ne sont pas, que je sache, les plus fortunés et, en tous les cas, classés parmi les catégories les plus riches. Nous sommes contre la hausse des cotisations de tous les auto-entrepreneurs, sans distinction de situation : il y a des chômeurs dans cette catégorie. Nous sommes contre une nouvelle atteinte au dispositif des services à la personne, qui risque d’accroître le chômage et le travail au noir. Nous sommes contre l’assujettissement au forfait social des petites indemnités de rupture conventionnelle. Nous sommes contre l’élargissement de la taxe sur les salaires aux participations des employeurs, à la prévoyance et aux assurances complémentaires santé. Nous ne pouvons donc que dénoncer la logique de financement à l’œuvre, car elle pèse trop sur l’emploi et la compétitivité de nos entreprises, sans régler la question de l’équité et de la justice, qui semble pourtant au cœur de votre projet. Nous avons fait des propositions concrètes pour en sortir. Ainsi, financer la santé et la famille pourrait se faire, au moins pour partie, par l’impôt et non plus par les revenus d’activité. Nous avons également évoqué trois grands chantiers en dépenses : celui du médicament, celui des actes superflus et celui des retraites. Pour les deux premiers, la commission des affaires sociales et la MECSS ont clairement fait apparaître des gisements d’économies potentiels, sans remettre en cause la qualité des soins et des services. Par exemple, selon la MECSS, 28 % des actes médicaux seraient superflus, ce qui représente un coût de 12 milliards à 15 milliards d’euros. En matière de retraite, nous reposons, pour la énième fois, la même question : à quand la réforme systémique et la retraite par points que nous appelons de nos vœux depuis si longtemps ? Pour l’instant, sur tous ces thèmes, nous n’avons pas été entendus. En première lecture, madame la ministre, un débat a cristallisé le hiatus existant entre les options gouvernementales et les options que nous préconisons. Je veux parler du débat sur l’article 16, relatif à la création de la CASA, la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, mais sur lequel, chacun le sait, s’est joué le vote des recettes. Le groupe CRC, M. Watrin l’a rappelé, ne veut pas en entendre parler. Moi-même et mes collègues du groupe UDI-UC sommes favorables à la CASA, mais à condition qu’elle soit affectée de manière pérenne à la compensation de l’APA au département et qu’elle ne soit pas elle-même compensée, à due concurrence, par une baisse de la part de CSG affectée à ce poste. Autrement dit, il nous faut, en priorité, garantir le financement des dispositifs existants de prise en charge de la dépendance avant de nous interroger sur le financement de la future réforme attendue en la matière, dont on ne sait d’ailleurs rien pour l’instant.   En première lecture, nous sommes parvenus à faire adopter l’amendement faisant de la CASA une ressource nette pour le financement de l’APA. Cela correspondait très exactement au dispositif prévu dans la proposition de loi de notre collègue Gérard Roche, adoptée par le Sénat le 25 octobre dernier. Naturellement, nous présenterons à nouveau cet amendement, ainsi d’ailleurs que tous ceux que nous avons défendus en première lecture. Si nous avons pu le faire adopter, c’est grâce au soutien du groupe RDSE et de l’UMP, malgré l’opposition du groupe socialiste et contre l’avis du Gouvernement. Dès lors, chacun sait qu’il n’aurait pas fait long feu. Madame la ministre, vous aviez là une occasion d’évoluer et de donner un véritable gage de « changement de cap ». Vous ne l’avez pas saisie. L’article 16 est, à nos yeux, emblématique de votre refus de choisir. Aujourd’hui, vous ne semblez pas plus prête à le faire qu’hier. Au final, le dispositif prévu pour la CASA ne peut satisfaire ni le groupe CRC ni le groupe UDI-UC. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je l’ai dit au début de mon intervention, les mêmes causes produisent les mêmes effets : vous connaissez la suite ! (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)