Les interventions en séance

Aménagement du territoire
28/11/2011

«Projet de loi de finances pour 2012 - Mission « Politique des territoires »»

M. Aymeri de Montesquiou

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, élu du Gers, le département le plus rural de France, avec 16 % de sa population active dans le secteur agricole, je vois bien sûr l’aménagement du territoire à travers le prisme rural. Je suis convaincu du potentiel de la ruralité, mais l’égalité des chances ne pourra pleinement s’exprimer qu’au moyen de la péréquation financière. Priorité proclamée du Gouvernement, qui doit en démontrer la réalité, la ruralité est placée sous votre autorité, monsieur le ministre, au même titre que l’agriculture et l’aménagement du territoire. J’en suis très heureux, car les profondes mutations de l’espace rural ont, depuis quelques années, bouleversé les territoires. La mission « Politique des territoires », la plus petite en termes budgétaires, avec 334 millions d’euros de crédits – on atteint toutefois 5,1 milliards d’euros si l’on regroupe les quinze missions transversales –, est fondamentale pour la structuration de notre pays. Hélas, nous constatons, sans nous résigner pour autant, que les contraintes budgétaires pèsent sur cette mission comme sur l’ensemble de la loi de finances. Dans son rapport, le comité présidé par Henri Guillaume juge que, sur les vingt et une niches fiscales de la mission, dix-huit sont inefficaces. Prenez-vous en considération ce rapport ? Quel sort réserverez-vous à ces niches ? Quel serait le montant des économies générées par l’éventuelle suppression des niches qui ont reçu un zéro en efficacité, monsieur le ministre ? L’économie de 3 millions d’euros sur les crédits non consommés des contrats État-régions est une mesure de bon sens, qui contribue à la maîtrise des dépenses publiques mise en œuvre dans ce PLF pour 2012. Les 235 millions d’euros alloués à la deuxième vague d’homologation des pôles d’excellence rurale encouragent la création de projets innovants et porteurs d’emplois. Ils constituent une réelle incitation à investir dans la ruralité. J’ai personnellement soutenu les PER gersois, qui participent au dynamisme de l’agriculture. Quelle est votre position, monsieur le ministre, sur la prime à l’aménagement du territoire, de 32,6 millions d’euros cette année ? Que répondez-vous aux critiques la Cour des comptes ? La PAT est pourtant, me semble-t-il, une mesure déterminante pour inciter les entreprises à s’installer dans les zones fragiles et dans celles qui sont ouvertes aux investissements étrangers. L’application du programme national Très haut débit et téléphonie mobile est décisif, car les zones rurales souffrent indubitablement d’une pénurie chronique des communications, que ce soient les routes, l’accès à l’internet ou la téléphonie mobile. Tous les orateurs ont aujourd’hui mis l’accent sur ces insuffisances. Tout le monde s’accorde sur le fait que l’horizon 2025 pour la couverture de l’ensemble du territoire est trop lointain. Envisagez-vous un nouveau calendrier, monsieur le ministre ? Il le faut ! Afin de contribuer à résorber les zones blanches et les zones grises, plus nombreuses en réalité que l’évaluation faite par l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, j’ai saisi les ministres Éric Besson et Philippe Richert de la candidature du Gers pour devenir département rural pilote dans la mise en place de la technologie 4G. Je vous demande de soutenir ce projet, monsieur le ministre. Vous serez jugé sur la réalité de votre politique visant à l’égalité des chances, en particulier si les territoires disposent d’une couverture numérique, absolument indispensable pour permettre l’implantation de PME. L’attractivité et la compétitivité sont au cœur de la politique des territoires. Elles sont les éléments cardinaux de l’action de la DATAR, qui prépare, impulse et coordonne les politiques d’aménagement du territoire. La DATAR établit études et analyses sur les nouvelles ruralités à l’horizon 2030-2040, en relation avec des centres de recherche comme l’INRA, et formule des scénarios prospectifs permettant d’anticiper les évolutions. Pour une meilleure stratégie, envisagez-vous un rapprochement de la DATAR avec le Commissariat général à l’investissement ? L’Agence française pour les investissements internationaux, nous le savons, promeut auprès des investisseurs étrangers l’attractivité territoriale et la compétitivité économique de notre pays, deuxième en Europe pour les investissements étrangers, après le Royaume-Uni et avant l’Allemagne. Nous pourrions renforcer sa régionalisation. Nos atouts pour attirer les investissements sont nombreux, dans les territoires ruraux : qualité de la main-d’œuvre, productivité horaire, formation, infrastructures ou qualité de vie. Néanmoins, il serait indispensable d’analyser la réalité des investissements internationaux sur notre sol. Quelle est la part des acquisitions immobilières ? Ces investissements ne constituent-ils pas souvent une prise de contrôle de PME ou de start-up destinée à acquérir savoir-faire et brevets avant, éventuellement, d’abandonner, dans un second temps, une coquille vide et des salariés à juste titre révoltés ? Pour attirer de nouvelles entreprises et de nouvelles populations, il est indispensable d’avoir une large offre de services au public. Nous ne pouvons plus avoir une vision conservatrice des services publics. Elle doit évoluer de façon pragmatique et stratégique sur l’ensemble du territoire, car la cohérence et l’équilibre sont les principes inhérents à l’aménagement du territoire. À ce titre, pouvez-vous tirer des enseignements de l’application de l’accord national « Plus de services au public » dans les vingt-trois départements pilotes ? Monsieur le ministre, la politique des territoires est certainement, aujourd’hui, l’une des missions les plus essentielles du budget. Vous devez donc être habité par une réflexion politique sur le long terme. L’aménagement harmonieux du territoire est un thème majeur, à travers lequel le Gouvernement doit nous présenter sa vision prospective de la France. Dans une démarche de résilience, tentons de positiver la crise économique et les efforts budgétaires qu’elle entraîne pour stimuler toute notre créativité. Nous avons certes peu de moyens financiers, alors démontrons notre capacité imaginative ! Vous devez être lucide et créatif, avoir du bon sens et une forte volonté d’agir. Encouragez les initiatives innovantes et les talents pour rendre espoir à nos territoires. Ils vous démontreront qu’ils possèdent l’indispensable courage et l’intelligence nécessaire. Le rapport du Conseil d’analyse économique, Créativité et innovation dans les territoires, est une mine de propositions pertinentes et audacieuses nous invitant à faire preuve de cette originalité nécessaire pour dynamiser l’économie des territoires, trop souvent endormie. La crise accentue notre tendance au pessimisme et au culte du déclin, mais je suis convaincu que notre pays est très riche en ressources et talents. J’ajouterai aussi que nous devons avoir confiance en notre jeunesse ! Vos propositions doivent constituer un appel au courage et au bon sens, monsieur le ministre. Ce sont les vertus de la ruralité, et il faut que votre politique leur permette de se concrétiser. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’UCR.)