Les interventions en séance

Affaires sociales
Yves Détraigne 27/05/2014

«Proposition de loi visant à instaurer un schéma régional des crématoriums»

M. Yves Détraigne

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui a pour objet d’offrir un dispositif mieux adapté à la population pour ce qui est de la crémation. En 2005, nos collègues Jean-Pierre Sueur et Jean-René Lecerf avaient déposé deux propositions de loi visant déjà à faire évoluer la législation funéraire. La loi de 2008 qui en a résulté a permis de renforcer les contrôles de qualification des professionnels et de développer la formation dans le secteur funéraire, mais aussi et surtout d’accompagner l’essor de la crémation en comblant certaines lacunes juridiques, notamment concernant le statut des cendres des défunts. Depuis cette loi, les communes ou les EPCI compétents de plus de 2 000 habitants sont notamment obligés de créer un site cinéraire. La proposition de loi visant à instaurer un schéma régional des crématoriums présentée par le président Sueur s’inscrit dans la continuité de la législation précédente. Elle résulte du constat que ce type d’équipements se trouve en nombre insuffisant sur le territoire. En outre, leur implantation géographique est parfois inadaptée, ce qui pénalise de nombreuses familles endeuillées. La France dispose de moins de deux crématoriums par département en moyenne, alors que l’évolution des rites funéraires depuis trente ans se traduit par une augmentation du recours à la crémation. Aujourd’hui, plus de 30 % des obsèques donnent lieu à crémation, contre 1 % en 1980. Si on compare deux régions similaires par leur population, Aquitaine et Midi-Pyrénées, qui comptent environ trois millions d’habitants chacune, on constate de grandes disparités : la région Aquitaine dispose de près de deux fois plus de crématoriums que sa voisine ; certains départements de la région Midi-Pyrénées sont même totalement dépourvus de tels équipements. Une rationalisation de l’implantation des crématoriums paraît donc pleinement justifiée pour permettre une accessibilité accrue à cette pratique funéraire. La mise en place d’un schéma régional des crématoriums permettrait également de diminuer les coûts pour les familles et les professionnels des secteurs aujourd’hui dépourvus de ces installations. Ainsi, sur le fond, on ne peut qu’être en accord avec cette proposition de loi. Elle tend à répondre aux préoccupations des familles, mais aussi à adapter nos infrastructures à une mutation profonde observée dans le choix des funérailles. Cependant, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur les conséquences de ce texte. Ce sont les communes et les intercommunalités compétentes qui sont chargées de créer et de gérer les crématoriums et les sites cinéraires. Dans un contexte de baisse drastique des dotations des collectivités territoriales, la question de la capacité des communes de certains départements à assurer et assumer un tel service peut se poser dans un avenir relativement proche. Notre rapporteur a d’ailleurs souligné que, dans certains cas, les collectivités se trouvaient exposées à un risque financier non négligeable, la rentabilité des crématoriums n’étant pas toujours assurée. Je salue l’introduction par la commission de considérations environnementales dans la proposition de loi, tant la France est en retard en la matière. En effet, à l’heure actuelle, rares sont les crématoriums dotés d’un système de filtrage limitant l’émission de polluants. Je rappelle que, aux termes de l’arrêté du 28 janvier 2010, qui découle de la loi du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire, tous les crématoriums devront être pourvus d’un système de filtrage avant 2018. Cet impératif environnemental se traduira cependant par une hausse des coûts pour les communes. Dans un contexte de baisse des dotations aux collectivités territoriales, les citoyens et les familles endeuillées devront certainement en supporter la charge. Je salue également la modification prévoyant que la révision du schéma régional ait lieu tous les six ans et non plus tous les cinq ans. Cela permettra de faire coïncider la durée du schéma avec celle du mandat des élus communaux et intercommunaux. Personnellement, je pense qu’un délai plus long aurait pu être retenu, étant donné le temps nécessaire pour mener à bien un tel projet. Quoi qu’il en soit, il faut saluer le travail entrepris depuis de nombreuses années par nos collègues Jean-Pierre Sueur et Jean-René Lecerf afin d’adapter notre législation à l’évolution des rituels funéraires dans notre société. Le législateur a vocation à s’atteler à des réformes liées à l’évolution de la société. La proposition de loi que nous examinons participe évidemment de cette approche. Le groupe UDI-UC la votera, car elle va dans le bon sens et tend à apporter une réponse concrète aux familles endeuillées. (Applaudissements.)