Les interventions en séance

Affaires sociales
Jean-Marie Vanlerenberghe 26/10/2010

«Réforme des retraites, conclusions de la commission mixte paritaire, Explication de vote»

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au bout d’un débat long et passionné – nous venons encore de le voir –, au cours duquel tout a été dit et redit maintes et maintes fois.
Essayons, pour notre part, d’en faire un rapide bilan.
Depuis la publication du projet de réforme des retraites, le groupe de l’Union centriste a approuvé sa mesure principale : le report de la borne d’âge de 60 ans à 62 ans. Il a approuvé ce report sous réserve qu’il soit aménagé pour les carrières longues et que soient réduites un certain nombre d’injustices et d’inégalités du système.
Ainsi, notre groupe refusait le passage brutal de 65 ans à 67 ans de la retraite sans décote pour les carrières incomplètes, car il pénalisait les plus fragiles. Le Gouvernement a accepté notre amendement visant à maintenir la borne de 65 ans pour les assurés ayant interrompu ou réduit leur carrière en leur qualité d’aidant familial ou pour élever trois enfants. Nous en avons évidemment pris acte avec satisfaction.
Le groupe centriste demandait aussi la prise en compte de la pénibilité à effets différés pour les salariés exposés à des risques professionnels réduisant leur espérance de vie.
Il souhaitait également, autre mesure essentielle à nos yeux, l’égalité de tous devant la retraite par la reconnaissance et la mise en œuvre du système universel par points.
De ces deux propositions, seule cette dernière a été retenue, et une réflexion nationale est envisagée sur la réforme systémique. Elle sera engagée en 2013, ce qui ouvre, avouons-le, un nouvel horizon pour sauver le principe de la répartition.
Sur la pénibilité, les sénateurs centristes ont regretté, monsieur le ministre, que le débat amorcé n’ait pu aller à son terme. Le sujet, d’importance, a été repoussé à 2014. Or, nous vous le rappelons, il est selon nous indispensable que, au regard de la cohésion sociale de notre pays, cette question soit réglée.
Ainsi, à la lumière de ce bilan, nous sommes aujourd’hui devant un dilemme : la bouteille est-elle à moitié pleine ou à moitié vide ?
Notre groupe est d’accord sur un point incontournable : il fallait agir dans l’urgence pour rétablir l’équilibre des comptes.
La majorité d’entre nous a jugé que cette réforme était nécessaire et que les amendements adoptés par le Parlement valaient approbation du texte.
D’autres, moins nombreux, ont décidé de ne pas empêcher cette réforme, mais de ne pas l’approuver non plus dans sa forme actuelle : ils s’abstiendront, tout en regrettant une certaine rigidité du Gouvernement. Trop préoccupé par l’équilibre financier du système, celui-ci n’a pas suffisamment pris en compte les dimensions sociale et humaine, notamment pour les carrières longues et la pénibilité.
Cela aurait permis de maintenir, pour les assurés concernés, la retraite à 60 ans, ce qui correspond en réalité, si l’on décode bien ce qui s’est passé, à la demande exprimée par la rue.
Arrêtons-nous un instant sur la méthode adoptée et rappelons-nous la formule du Michel Crozier, sociologue fort célèbre voilà encore quelques années : « On ne change pas la société par décret. »
Nous regrettons que le dialogue social n’ait pas été poussé à son terme, à savoir la recherche d’un compromis équilibré avec les partenaires.
Au final, je crains que le coût social de cette réforme ne soit supérieur aux économies financières, pourtant indispensables, qu’elle doit engendrer.
On ne sauvera d’ailleurs pas les retraites sans une redéfinition de la valeur travail et une politique plus dynamique de l’emploi, notamment en faveur des jeunes et des seniors. Certes, c’est un autre débat, mais il pèse à tel point sur le sujet des retraites qu’on ne pourra, demain, en faire l’économie. tout le monde le sait, il n’est pas possible de continuer à financer les retraites à crédit, via la CADES, la caisse d’amortissement de la dette sociale.
Je ne voudrais pas terminer ce propos sans remercier chaleureusement Mme la présidente de la commission des affaires sociales, Muguette Dini, mais aussi le rapporteur, Dominique Leclerc, pour son écoute, sa compétence, ses convictions – il en a fallu ! –, bref non seulement pour la qualité de son travail, mais aussi pour sa patience devant tant de passion. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)