Les interventions en séance

Budget
Yves Détraigne, Daniel Dubois, Catherine Morin-Desailly, François Zocchetto, Vincent Capo-Canellas, Vincent Delahaye, Hervé Marseille, Gérard Roche 25/07/2012

«Projet de loi de finances rectificative pour 2012-Article 1er-L՚amendement n° 144 rectifié bis présenté par MM. Arthuis, Zocchetto, de Montesquiou, Dubois, Boyer, Delahaye, Marseille et Amoudry, Mme Morin-Desailly, MM. Roche, Capo-Canellas, Détraigne et l»

M. Jean Arthuis

J’ai exposé à plusieurs reprises notre philosophie et nos convictions en matière de compétitivité. Je n’ai jamais dit que celle-ci dépendait exclusivement des charges patronales pesant sur les salaires. Nous avons évidemment besoin d’innovation, d’investissement et de recherche, et il nous faut bien entendu soutenir les PME, mais il faut également prendre en compte le facteur travail. Nous sommes au cœur d’un vrai débat sur notre stratégie fiscale. La référence à 1789 est naturellement fondamentale. Mais dites-moi, mes chers collègues, quel était le niveau des prélèvements sociaux en 1789 ? A la Libération., il a été décidé que les salaires constitueraient l’assiette du financement de la sécurité sociale. Est-ce encore un principe de justice aujourd’hui, dans une économie mondialisée ? Le citoyen qui ne consomme que des produits venus de l’étranger ne participe pas au financement de sa protection sociale parce que le prix qu’il paie ne contribue en aucune façon à ce financement ; en revanche, ceux d’entre nous qui consomment des produits et services issus du travail français participent, à travers le prix qu’ils paient, au financement de leur protection sociale. Dites-moi où sont la justice et l’injustice ! Je vous en prie, sortons de nos schémas traditionnels ! C’est formidable de penser que les salaires doivent rester l’assiette des cotisations sociales, mais, comme l’a rappelé Philippe Marini, nous transférons chaque année des impôts d’État pour financer la sécurité sociale… Les salaires s’estompent, en quelque sorte. Ce sont les représentant des syndicats qui gèrent les caisses, mais nombre d’entre eux représentent plutôt la sphère publique que la sphère privée concurrentielle ; permettez-moi de le souligner. Je voudrais aussi combattre l’idée que les salaires pèsent peu dans la valeur ajoutée des entreprises. Comme je l’ai dit hier, le prix que paient les entreprises pour s’approprier des sous-ensembles et des ensembles qu’elles transforment ou manufacturent – je pense notamment aux prestations extérieures et aux fournitures – est largement déterminé par des salaires versés en amont. Le poids des salaires est donc considérable ! Au demeurant, si nous voulons avoir un impact décisif, il ne faut pas nous en tenir à une hausse de 1,6 point de TVA mais prévoir le basculement de 50 milliards d’euros. Si vous me le permettez, monsieur le président, je voudrais me livrer à une petite démonstration. Avec le basculement de 50 milliards d’euros que je propose, un produit actuellement vendu à 100 euros hors taxes pourrait être mis sur le marché à 95 euros hors taxes. Si l’on applique une TVA de 19,6 % à un prix de 100 euros, le consommateur paie 119,60 euros ; si l’on applique une TVA de 25 % à un prix de 95 euros, le consommateur paie 118,75 euros, c’est-à-dire moins que 119,60 euros. J’affirme qu’une hausse de la TVA associée à un allègement des cotisations sociales dans une proportion significative n’entraînerait pas d’augmentation des produits issus du travail français. Il n’y aurait donc aucune injustice ! Il est vrai que les produits importés seraient mis sur le marché à un prix plus élevé mais, dans la mesure où ceux qui importent sont aussi ceux qui réalisent les marges les plus considérables, ils ne répercuteraient pas l’intégralité de la hausse de TVA, de sorte que l’inflation serait inférieure à cette hausse. En revanche, notre gain de compétitivité à l’export serait total puisque nous exportons hors TVA. Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous conseille de garder la CSG pour financer la prise en charge de la dépendance lorsque vous serez en mesure de nous présenter un projet crédible ! J’ajoute que, si nous allégions les cotisations sociales, nous les allégerions pour tous les employeurs, y compris les employeurs publics. Les salaires des trois fonctions publiques représentent à peu près 250 milliards d’euros chaque année ; l’allègement des cotisations sociales se traduirait donc par un allègement significatif des charges que supportent les collectivités territoriales, les hôpitaux, les établissements sanitaires et l’État employeur. Je vous invite donc, mes chers collègues, à vous associer à l’amendement que je présente au nom du groupe de l’Union centriste et républicaine. (Applaudissements sur les travées de l’UCR ainsi que sur certaines travées de l’UMP.)