Les interventions en séance

Droit et réglementations
Jean-Marie Vanlerenberghe 20/04/2013

«Projet de loi relatif à la sécurisation de l՚emploi-Explication de vote unique sur les articles 5 à 20 et l’ensemble du texte »

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas, si ce n’est cursivement, sur ce que vient de rappeler ma collègue Nathalie Goulet au sujet du vote bloqué. Les responsabilités sont manifestement partagées entre le Gouvernement et le groupe CRC, qui a joué à l’apprenti sorcier et nous a privés d’un débat clair et nourri sur un texte essentiel pour la démocratie et le fonctionnement économique de notre pays. Ce projet de loi a permis de mettre en lumière un problème de fond. Nous venons d’assister, ici au Sénat, à une rupture spectaculaire entre le parti communiste et le parti socialiste, entre la gauche de la gauche et l’autre gauche, sur un texte loin d’être anodin, un texte essentiel, même. Cette rupture est symbolique et démontre à l’envi, si besoin était, qu’il existe deux lectures diamétralement opposées de la démocratie et du dialogue social, l’une marxiste, dans une approche de lutte des classes, et l’autre sociale-démocrate. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Madame Assassi, vous parlerez pendant le temps qui vous est imparti. On est en droit de se demander si la majorité est encore en mesure d’avancer de cette façon chaotique et de gouverner sans clarification de sa ligne politique. Nous pensons en tout cas que les Français ont le droit de savoir. Venons-en au projet de loi. Il marque des progrès sociaux incontestables, et il faut saluer tous les signataires de l’accord national interprofessionnel, qui nous ont permis d’avancer. Pour notre part, convenez-en, nous avons cherché à transposer de manière loyale et respectueuse cet accord en termes législatifs. Même si quelques-uns de nos amendements ont été rejetés, ce qui prive peut-être le texte de certaines précisions utiles, monsieur le ministre, le projet de loi a intégré suffisamment d’amendements de notre groupe pour que nous nous réjouissions de son adoption. Je pense par exemple aux dispositions relatives à la complémentaire santé ; les amendements de transparence, qui ont bien entendu été corrigés, permettent néanmoins de clarifier la situation s’agissant du choix des opérateurs. Il faut mentionner aussi le contrat personnel de formation, qui constitue à mes yeux un progrès essentiel pour l’avenir des entreprises de notre pays. Il en va de même des droits rechargeables pour les chômeurs. La participation des salariés aux conseils d’administration et aux conseils de surveillance, mais aussi la consultation du comité d’entreprise sur la stratégie de l’entreprise constituent des avancées pour la démocratie. Je reconnais également qu’un effort, certes encore un peu insuffisant, a été fait pour favoriser le recul des contrats courts. Nous sommes vraiment favorables à un contrat à durée indéterminée et à droits progressifs qui conserve en même temps la souplesse nécessaire. Il existe des abus auxquels il faudra mettre un terme, et je doute que le présent projet de loi suffise sur ce point, mais ce texte n’en constitue pas moins un progrès. En ce qui concerne le temps partiel, vous avez apaisé nos craintes, monsieur le ministre, en précisant que, dans le secteur médico-social et dans le secteur des services à la personne, vous seriez vigilant et attentif au respect de l’accord mais aussi à la possibilité de sa mise en œuvre. Nous serons nous aussi très vigilants. Si j’ai bien compris, rendez-vous est pris pour 2014. Que dire du cœur du projet de loi ? Il me paraît équilibré. Il comporte des dispositions relatives au maintien dans l’emploi et à la mobilité interne. L’encadrement des licenciements collectifs et les mesures de reclassement apportent incontestablement plus de souplesse aux entreprises, mais, en contrepartie, comme cela vient d’être souligné, des droits nouveaux sont apportés aux salariés ; c’est cela qui me paraît fondamental. Nous attendons beaucoup de ce projet de loi, qui marque un tournant remarquable, fondamental dans les relations sociales en France. Notre pays rejoint enfin le camp des démocraties nordiques, qui ont inspiré par leur succès, reconnaissons-le, la flexisécurité à la française. Je parle du succès des pays nordiques parce qu’on voit aujourd’hui les résultats de leur politique en matière de taux de chômage. L’esprit de l’accord national interprofessionnel correspond à la philosophie de la démocratie sociale et du dialogue social qui inspire la politique de notre groupe et est, je l’ai rappelé, l’émanation des formations politiques centristes et démocrates-sociales depuis les lendemains de la Seconde Guerre mondiale. C’est la première raison pour laquelle nous voterons le projet de loi. Dans notre contexte économique dépressif, je ne sais pas si ce texte permettra de créer des emplois, mais j’espère vivement qu’il permettra d’en sauver ; c’est la seconde raison pour laquelle nous le voterons. Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous remarquerez que nous savons dépasser les querelles partisanes pour approuver ce qui nous paraît essentiel pour l’avenir de notre pays et de notre économie. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.)