Les interventions en séance

Nathalie Goulet, Philippe Bonnecarrère 18/10/2017

«SÉCURITÉ INTÉRIEURE ET LUTTE CONTRE LE TERRORISME (Conclusions de la Commission Mixte Paritaire) - Discussion générale»

N/A

M. Philippe Bonnecarrère . - Ce projet de loi aura montré la pertinence du bicamérisme. La CMP est parvenue à un accord satisfaisant. Le groupe UC, fidèle aux enjeux d'unité nationale et d'efficacité, soutient ce texte pour deux raisons : la nécessaire sortie de l'état d'urgence et la pertinence d'intégrer les mesures utiles de l'état d'urgence dans notre droit commun. Au 1er novembre 2017, notre pays aura vécu deux ans sous l'état d'urgence. Cela ne pouvait durer davantage : il fallait en sortir sans désarmer l'État de droit. Ce projet de loi nous fait revenir à un cadre juridique classique et hiérarchisé. La CMP a validé les avancées de notre Haute Assemblée sur plusieurs points. La clause d'autodestruction élargie, un des principaux apports du Sénat, a été préservée. Le dispositif pourra être prorogé, pérennisé et réécrit en fonction de l'évolution des menaces. Nous sommes parvenus au bout du processus législatif avec un véritable arsenal juridique puisque huit lois ont été adoptées en quatre ans. Nous sommes arrivés aux limites de la créativité juridique acceptable, de l'équilibre entre sécurité et libertés publiques. Le droit administratif a évolué vers la sanction, le droit pénal intervient très en amont du passage à l'acte, au point de friser la notion de prévention.

Tout est maintenant une question de mise en oeuvre. Comment assurer l'efficacité de la chaîne pénale pour les personnes de retour de la zone irako-syrienne, et comment traiter la future libération de djihadistes qui pourraient avoir pour seul désir de se transformer en bombes humaines ? Des réponses à ces questions dépend notre sécurité à venir. 
  Mme Nathalie Goulet . - J'ai été la première à demander, en juin 2014, une commission d'enquête sur les réseaux djihadistes. Ses travaux ont été malheureusement fort utiles. Ce texte suffira-t-il à lutter contre la menace ? Je n'en suis pas certaine. C'est la guerre de l'obus et du blindage, nous sommes dans la réaction systématique. On multiplie les contrôles, les textes sur le renseignement - au passage, les décrets de la loi sur le renseignement de 2016 n'ont pas tous été pris, les ingérences dans la vie privée mais on prive les communes des éléments essentiels de contrôle : la délivrance des cartes nationales d'identité et les autorisations de sortie. Pourquoi refuser d'étendre le système alsacien des déclarations domiciliaires ? Vous voulez fermer des mosquées mais ce n'est pas là qu'a lieu la radicalisation. Qu'avez-vous fait pour la formation des imams et des aumôniers ? L'islam du Maroc serait celui du juste milieu mais on sait le rôle qu'a joué un imam marocain dans les attentats de Barcelone. Qu'allons-nous faire des 12 000 personnes radicalisées ? Des officines de prévention de la radicalisation ? Il faut de l'argent pour Europol, pour Frontex, pour nos services de lutte antiterroriste et un PNR efficace. Pour finir, une proposition iconoclaste : Mme Parly a dit tout haut ce que beaucoup pensent, nous ne pouvons pas ramener sur notre territoire les djihadistes français de Rakka. En revanche, nous ne pouvons pas ne pas les juger. Eh bien, créons pour eux un tribunal pénal international !