Les interventions en séance

Collectivités territoriales
Hervé Maurey 18/06/2013

«Projet de loi relatif à l’élection des sénateurs-Articles additionnels avant l՚article 1er-Explication de vote»

M. Hervé Maurey

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voterai les amendements identiques de suppression de l’article 1er, pour les raisons qui sont exposées dans l’étude d’impact. Comme cela a été rappelé, cette disposition a pour objet d’assurer une meilleure représentation des zones urbaines et une meilleure prise en compte du poids démographique des communes. Or je suis en désaccord total avec ce double objectif ! Renforcer les zones urbaines se fait forcément au détriment du monde rural, n’en déplaise à M. le ministre, qui s’est agacé à ce sujet, ce qui montre d’ailleurs qu’il n’est pas très à l’aise. (M. le ministre s’exclame.) L’inverse n’est pas possible, et j’ai vraiment apprécié l’expression utilisée par l’un de nos collègues, qui parlait de texte « ruralicide ». En effet, c’est bien de cela qu’il s’agit. Et n’en déplaise, là encore, à M. le ministre, le texte relatif au mode de scrutin binominal pour les élections départementales va dans le même sens. Texte après texte, dispositif après dispositif, on s’achemine donc toujours vers la réduction du poids du monde rural. Monsieur le ministre, au cours de la discussion générale, vous avez affirmé qu’il s’agissait d’assurer une meilleure prise en compte du poids démographique des communes. Je m’en étais d’ailleurs étonné : comment espérer renforcer les territoires en accentuant le poids de la démographie ? C’est exactement l’inverse qui se produira ! Quand on parle de territoires, on ne doit pas prendre en compte leur poids démographique, c’est-à-dire leur nombre d’habitants. C’est l’Assemblée nationale qui représente le peuple. Le poids de la démographie et le nombre d’habitants d’un territoire s’expriment lors des élections législatives, et non lors des élections sénatoriales. (M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.) Monsieur le ministre, selon vous, deux tiers des délégués représenteraient les communes de moins de 10 000 habitants. Je rappelle que les deux tiers des communes comptent moins de 500 habitants. Le poids relatif des collectivités est donc déjà clairement pris en compte. L’argument avancé pour tenter de nous rassurer est que cette réforme ne changerait finalement pas grand-chose : 3 000 délégués seraient concernés sur 150 000, ce qui ne serait pas beaucoup. C’est peut-être vrai, mais j’observe tout de même, et cela a été souligné par Michel Mercier et Yves Détraigne, que, dans certains départements, dont le Rhône et le Val-de-Marne, cette réforme aura un impact très fort sur le collège électoral. En outre, comme je viens de l’indiquer, il s’agit encore et encore de porter des mauvais coups au monde rural. En écoutant Gaëtan Gorce, dont les propos pouvaient paraître provocants – ils l’étaient, de fait –, je me suis demandé s’il n’était pas d’une certaine façon en service commandé.(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) pour exprimer tout haut ce qu’un certain nombre de parlementaires socialistes pensent tout bas : le Sénat est une « anomalie démocratique », pour reprendre la formule d’un illustre socialiste. Par conséquent, on essaie peu à peu – heureusement, la jurisprudence du Conseil constitutionnel est là – de rogner son rôle comme représentant des territoires et des collectivités locales. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)