Les interventions en séance

Justice
13/05/2011

«Projet de loi relatif aux soins psychiatriques - Explication de vote»

 

M. Denis Badré

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il n’est pas très facile d’intervenir après Muguette Dini, au nom du groupe de l’Union centriste dont elle est l’un des membres les plus éminents, et à la suite de l’analyse très percutante qu’elle vient de nous présenter de ce projet de loi. Je m’efforcerai néanmoins de faire de mon mieux. L’examen du texte qui va être soumis à notre vote a été, c’est le moins que l’on puisse dire, très riche en rebondissements. Voilà quelques instants encore, en disant qu’elle partageait l’analyse de Mme Anne-Marie Payet présentée au travers de l’amendement n° 436 rectifié, notre assemblée a pris quelques libertés avec l’orthodoxie, bien que ce ne soit pas l’usage. Il allait cependant de soi que nous devions apporter notre soutien au combat que mène Anne-Marie Payet avec beaucoup de conviction et de force. Je pense donc que nous avons bien fait de nous prononcer de cette manière même si ce n’était pas tout à fait la voie habituelle, d’autant que je ne suis pas inquiet pour la suite, sachant que la commission mixte paritaire remettra le texte dans l’ordre. Il fallait envoyer ce message : cela a été fait et c’est bien. Atypiques ont été aussi l’ensemble des travaux qui ont été conduits au fil des dernières semaines, où nous avons vu une commission rejeter un texte après l’avoir très substantiellement amendé, un rapporteur démissionner – et quel rapporteur, Muguette Dini elle-même, présidente de la commission des affaires sociales ! –, une commission d’examen des amendements extérieurs dominée par l’opposition, un nouveau rapporteur reprendre en vol l’examen du texte et amené à présenter des avis favorables sur des amendements qu’il contrait en tant que rapporteur. Tout cela montre que nous avons encore du chemin à faire pour apprivoiser complètement la réforme constitutionnelle de 2008. (M. Guy Fischer s’exclame.) C’est d’ailleurs également de cette réforme qu’il est question s’agissant du fond même du texte. En effet, ce dernier répondait pour une large part à une question prioritaire de constitutionnalité imposant un renforcement du contrôle judiciaire sur les hospitalisations sans consentement. Ce projet de loi comporte aussi un second volet, médical quant à lui, afin de mettre en place des solutions alternatives à l’hospitalisation complète. L’un et l’autre de ces volets, tels qu’ils nous venaient de l’Assemblée nationale, posaient deux problèmes de fond : comment préciser les solutions alternatives à l’hospitalisation complète que le texte entendait promouvoir ? Comment renforcer les pouvoirs du juge pour établir un équilibre avec l’autorité préfectorale, sans pour autant choisir la voie d’une judiciarisation excessive ? Sur chacun de ces deux points, une formule, qui me semble raisonnable, a pu être dégagée, et ce grâce au travail énorme et remarquable effectué par nos commissions, mais aussi, je dois le dire, à l’écoute du Gouvernement. En cet instant, je veux féliciter Muguette Dini et Jean-Louis Lorrain, les deux rapporteurs successifs de la commission des affaires sociales, ainsi que Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour l’excellence de leur travail. J’en profite également pour vous remercier, madame la secrétaire d’État, de votre ouverture et votre sens du compromis. Grâce à un amendement de notre collègue Alain Milon, sous-amendé par Jean-Louis Lorrain, nous avons clarifié la notion d’alternative à l’hospitalisation complète. En matière de contrôle judiciaire, nous avons donné la possibilité qu’une hospitalisation complète soit commuée en un programme de soins sous l’impulsion du juge des libertés et de la détention, sans que ce dernier s’en trouve exagérément surchargé, ce à quoi nous tenions. Nous avons adopté le principe de l’unification du contentieux. J’ai cru comprendre que ce point avait donné lieu à des débats assez difficiles en commission. Cependant, grâce à un travail ultérieur, la situation a pu se dénouer dans de bonnes conditions lors de notre débat en séance plénière. Les solutions retenues me semblent satisfaisantes. Leur détermination témoigne de l’intérêt de ce que l’on appelle, à un échelon qui m’est cher, celui de l’Union européenne, la coproduction législative. À mes yeux, nous avons accompli un bon exercice de coproduction législative. À quelque chose malheur est bon : nous ouvrons des voies, nous défrichons. L’immense majorité du groupe de l’Union centriste votera donc ce texte.