Les interventions en séance

Budget
11/12/2012

«Projet de loi relatif à la création de la Banque Publique d’Investissement-Explication de vote»

M. Jean Arthuis

Le véritable problème que nous avons à résoudre, monsieur le ministre, est celui de la croissance, de la recréation d’emplois et de la lutte contre le chômage. Nous savons bien que c’est d’abord de compétitivité qu’il s’agit ; le financement des entreprises vient en second. C’est parce que les conditions de la compétitivité sont réunies que l’on peut assurer ce financement. Il est vain de financer des entreprises qui ne répondent pas aux exigences de compétitivité. De cela, nous aurons l’occasion de parler à nouveau lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative. Les sénateurs de l’UDI-UC ont entamé cette discussion avec beaucoup de bienveillance, comme l’attestent les propos de notre porte-parole, Aymeri de Montesquiou, dans la discussion générale. Je dois vous avouer pourtant que nous avons été déçus. Monsieur le ministre, vous avez eu recours à la loi, dans sa majesté. Mais pour quoi ? OSEO existe et fonctionne dans des conditions satisfaisantes que chacun reconnaît, avec des instances régionalisées. Quant aux participations et au financement du capital des PME, ils sont assurés par CDC Entreprises avec ses délégations régionales. Si le propos de ce texte est la coordination, cela relève de la gouvernance et non nécessairement de la loi. Je pense donc que la valeur ajoutée de la loi n’est pas ici démontrée. Alors, bien sûr, on imagine cette banque publique comme une sorte de corne d’abondance. Mais d’où viendra son capital social ? Je n’ai pas vu dans la loi de finances initiale l’inscription de crédits pour abonder le capital de la BPI. On fera donc ce que l’on a déjà fait pour le Fonds stratégique d’investissement. Et je ne saurais ici être suspect d’esprit partisan si j’indique que les conditions que l’on fait à la BPI me font penser à celles qui ont présidé à la constitution du FSI : comme on n’a pas d’argent, la Caisse des dépôts et consignations et l’État apporteront chacun des participations, sans toutefois que cela crée des liquidités pour assurer la mission de financement des entreprises. J’ai une seconde critique à formuler, concernant cette fois la présence d’élus politiques dans le conseil d’administration, qui n’est pas forcément un gage de bonne gestion… Dois-je vous rappeler, chers collègues, que Dexia a eu le privilège de compter dans son conseil d’administration des élus politiques ? Je ne suis pas sûr qu’ils aient contribué à redresser le navire au moment où il était en péril ! Je crois que la présence d’élus politiques dans le conseil d’administration d’une banque constitue une source de vrais conflits d’intérêts. C’est une formule que l’on a tort de choisir. Monsieur le ministre, vous nous avez dit tout à l’heure que les entreprises auraient une créance sur l’État. C’est l’objet du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Autrement dit, les entreprises vont bénéficier, en 2013, d’un allègement de charges sociales de 20 milliards d’euros, mais elles vont devoir d’abord financer elles-mêmes cet allègement. L’État nous présentera ensuite une exécution budgétaire sans avouer l’existence d’un déficit supplémentaire de 20 milliards d’euros. Alors, oui, les entreprises auront bien une créance sur l’État, monsieur le ministre, mais je ne crois pas que l’État ait prévu d’enregistrer une dette envers les entreprises. Autrement dit, les entreprises vont préfinancer cet allègement de charges sociales, et j’ai compris que la BPI allait servir à couvrir cette nécessité de financement. Monsieur le ministre, si je vous ai bien compris, la BPI va donc servir à financer le budget de l’État (Protestations sur les travées du groupe socialiste.), puisque les entreprises feront l’avance et que ce besoin de financement sera couvert par la Banque publique d’investissement. Dans ces conditions, monsieur le ministre, vous comprendrez que notre groupe, dans sa majorité, votera contre ce projet de loi.