Les interventions en séance

Affaires sociales
11/07/2011

«Projet de loi constitutionnelle, relatif à l’équilibre des finances publiques »

Mme Muguette Dini, Présidente de la Commission des Affaires sociales, en remplacement de M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, bien que cela ne soit pas dans ses habitudes, la commission des affaires sociales a souhaité se saisir une nouvelle fois, au stade de la deuxième lecture, de ce projet de loi constitutionnelle, compte tenu de l’importance des enjeux. Notre rapporteur, Alain Vasselle, l’a dit en première lecture, ce texte mérite d’être soutenu. Les lois-cadres d’équilibre des finances publiques nous imposeront de définir une trajectoire d’assainissement de nos finances publiques qui aura une portée contraignante pour le Gouvernement et le législateur. Nous connaissons des déficits depuis bientôt quarante ans et l’expérience a montré que la volonté politique n’a pas réussi à les limiter, même dans les périodes plus favorables où la croissance nous aurait permis de le faire. Dans ces conditions, les deux assemblées ont trouvé sans mal un accord sur les dispositions du texte relatives aux lois-cadres d’équilibre des finances publiques. Je le rappelle néanmoins, le Sénat avait adopté en première lecture un amendement visant à confier systématiquement l’examen de ces projets de loi-cadre à une commission spéciale composée de membres de la commission des finances et de la commission des affaires sociales. L’Assemblée nationale ayant jugé inutile d’inscrire cette disposition dans la Constitution, nous n’avons pas présenté de nouveau cet amendement. Pour autant, nous persistons à considérer comme indispensable la constitution d’une telle commission spéciale sur des textes de cette nature, car il deviendra essentiel de faire travailler ensemble les spécialistes des finances de l’État et des finances sociales. Nous en ferons d’ailleurs la demande en conférence des présidents. Si la création des lois-cadres ne suscite pas de difficultés particulières, la question du monopole des lois financières en matière de fiscalité et de recettes de la sécurité sociale reste très débattue entre les deux assemblées, chacune campant sur ses positions : l’Assemblée nationale a confirmé ce monopole, en l’aménageant, tandis que le Sénat a maintenu le dispositif alternatif qu’il préconise. En deuxième lecture, les députés ont rétabli le texte qu’ils avaient précédemment adopté. La commission des affaires sociales continue à penser, comme la commission des lois saisie au fond, que ce monopole présente plus d’inconvénients que d’avantages. Il aurait en effet pour conséquence de limiter drastiquement l’initiative parlementaire, et les articles 2 bis et 9 bis, insérés par l’Assemblée nationale, ne changent rien à cet état de fait. Par ces articles, on ne fait en réalité qu’introduire une forme d’hypocrisie dans le dispositif, puisque le Gouvernement serait libre d’invoquer ou non l’irrecevabilité des mesures ne respectant pas le monopole, tout en ayant l’assurance que le Conseil constitutionnel censurerait les dispositions qui n’auraient pas été déclarées irrecevables pendant la discussion. Par ailleurs, le monopole aurait pour effet de rendre très difficile, pour le Parlement, l’appréhension des grandes réformes. En éclater les mesures constitutives entre des textes ordinaires et des textes financiers que les assemblées ne pourraient discuter simultanément nous mettrait en grande difficulté pour mesurer la portée exacte des évolutions envisagées et proposer des améliorations. Enfin, le monopole des lois financières aurait pour effet de nous contraindre à débattre de la fiscalité et des recettes de la sécurité sociale exclusivement à l’occasion de textes dont les conditions d’examen sont sévèrement encadrées. À la limite, on pourrait presque soutenir une proposition inverse : est-il raisonnable d’effectuer une grande réforme de la fiscalité dans le cadre de l’examen de la loi de finances, qui ne fait l’objet que d’une lecture dans chaque assemblée et est toujours examinée dans l’urgence ? J’ajoute que le monopole des lois financières est non seulement dangereux, mais aussi inutile. Dès lors que nous mettrons en œuvre les lois-cadres d’équilibre des finances publiques, Parlement et Gouvernement s’imposeront nécessairement une discipline qui les conduira à cesser de saupoudrer, dans l’ensemble des projets de loi, mesures d’allégement de charges sociales ou niches fiscales. N’oublions pas que le respect de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques sera vérifié chaque année par le Conseil constitutionnel. Dans ces conditions, la commission des affaires sociales a proposé, comme la commission des lois, de rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture, lequel subordonne l’entrée en vigueur des mesures relatives aux recettes fiscales et sociales à leur approbation dans le cadre de la loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Le président de la commission des lois, rapporteur de ce texte, nous propose désormais de supprimer purement et simplement le monopole des lois financières. Il s’agit d’une position raisonnable, qui mérite d’être approuvée et ne vide en rien de sa substance le projet de loi constitutionnelle qui nous est soumis. Sous réserve de l’adoption des amendements de la commission des lois, la commission des affaires sociales est donc favorable à ce projet de loi constitutionnelle et souhaite que le texte qui résultera de nos travaux, mes chers collègues, puisse faire l’objet d’un accord de la part de l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)