Les propositions de loi

Droit et réglementations
10/06/2008

«Proposition de loi tendant à assurer une plus grande équité dans notre politique de sécurité notamment en matière de retrait des points du permis de conduire»

 

Le texte de la proposition de loi en PDF, version imprimable :

PPL-N.About-Retraitdepoints-juin2008.pdf  

EXPOSÉ DES MOTIFS

  Madame, Monsieur, Instauré en 1989, le permis à points est un outil destiné à responsabiliser les automobilistes et à renforcer la lutte contre l’insécurité routière. Le système de retrait des points est défini en fonction de la gravité des infractions commises sur la route. Il a pour but d’inciter les conducteurs à réfléchir sur les conséquences de leur comportement et de leur conduite à risque. Conformément au souhait du législateur, le nombre de points susceptibles d’être retirés en fonction de l’infraction commise est fixé par voie réglementaire, à l’article R. 413-14 du code de la route. Précisément, l’article R. 413-14 prévoit qu’en cas de dépassement de la vitesse maximale autorisée de moins de 20 km par heure, l’infraction entraîne automatiquement, outre l’amende forfaitaire correspondante, la réduction d’un point sur le permis de conduire. Cette règle vaut, y compris pour les petits excès de vitesse, inférieurs à 5 km par heure. Cette dernière disposition réglementaire est particulièrement injuste, car à moins de 5 km par heure, le contrevenant n’est ni un délinquant, ni un danger public. Pourtant, la sanction par retrait de points est automatique. Au bout d’un certain laps de temps, le cumul de plusieurs petits excès de vitesse, peut ainsi conduire à l’invalidation pure et simple du permis de conduire. Or, le permis de conduire constitue, pour bon nombre de nos concitoyens, un moyen indispensable d’insertion sociale, un gage d’autonomie, une condition sine qua non à la recherche d’emploi. Par ailleurs, la loi n° 2008-758 du 1 er août 2008 relative aux droits et devoirs des demandeurs d’emploi prévoit, dans son article premier, parmi les critères définissant une offre raisonnable d’emploi, une distance maximale de 30 km entre l’emploi proposé et le domicile, ou bien un emploi situé à moins d’une heure de transports en commun par jour. Cet éloignement signifie donc, pour beaucoup de nos concitoyens, la nécessité de disposer d’un permis de conduire valide, titre d’ailleurs jugé indispensable par de nombreux recruteurs, lorsqu’un candidat se présente à un emploi.  Outre ces conséquences sociales, ce dispositif de retrait d’un point de permis entraîne d’autres conséquences, souvent dommageables, en matière d’assurance. En effet, une série de petits excès de vitesse peut conduire à la perte de la totalité des points du permis, sans que son détenteur en soit toujours immédiatement conscient. Lorsque le permis est invalidé, les assurances ne couvrent plus le véhicule, sans que l’assuré en soit toujours informé. Ainsi, il n’est pas rare de voir des assurés, à l’occasion d’un accident de voiture, s’apercevoir mais trop tard que le véhicule qu’ils croyaient assuré ne l’était plus. Ceci peut avoir des conséquences graves, en cas de blessures ou de dommages matériels, y compris vis-à-vis des tiers. Lorsque le conducteur d’un véhicule, qui a commis un dommage, n’est plus titulaire du permis de conduire, le fonds de garantie automobile (FGAO), qui vient précisément en aide aux victimes des conducteurs sans permis, est alors autorisé à se retourner contre l’auteur de l’accident, qui doit alors assumer, sur ses fonds propres, une partie des indemnisations.  C’est pourquoi, afin de protéger les détenteurs de permis de conduire qui, rappelons-le, en cas de petits excès de vitesse, ne sont ni des délinquants, ni des dangers publics, la présente proposition de loi vise à supprimer la réduction d’un point du permis de conduire, lorsque l’excès de vitesse ne dépasse pas la vitesse maximale autorisée de 5 km par heure. En revanche, la contravention sous forme d’amende serait toujours, bien entendu, applicable. Le dispositif proposé prévoit également, dans l’article premier, la restitution immédiate des points de permis qui ont été retirés, sous le chef de cette infraction.  La proposition de loi prévoit, en outre, dans son article 6, la couverture par les assurances des risques pesant sur le véhicule, jusqu’à la date d’échéance du contrat, lorsque plus de la moitié des points a été retirée du permis du conducteur, du fait d’excès de vitesse inférieurs à 20 km par heure.  Corrélativement, le texte se propose, à l’article 7, de renforce les contrôles sur la détention du permis lui-même. Les compagnies d’assurance se verraient ainsi confier le soin de vérifier, à chaque renouvellement de contrat, si l’assuré est toujours titulaire du permis de conduire. Ce dernier devrait justifier de son titre, par la production d’un certificat de détention du permis, d’une validité de moins d’un mois, délivré par la préfecture de son département de résidence. Ce dispositif s’inspire du modèle de certificat de situation administrative (ou certificat de non-gage), qu’un vendeur de véhicule d’occasion est tenu de produire, auprès de l’acquéreur, en application de l’article L. 322-2 du code de la route. Le dispositif est également complété par un renforcement des sanctions à l’encontre des automobilistes présentant un comportement véritablement dangereux, sur la voie publique. Depuis la loi Perben de 2004, le fait de conduire sans permis est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. De même, le fait de conduire sans assurance est puni de 3 750 € d’amende. L’article 4 renforce cette dernière disposition puisqu’il prévoit, outre l’amende, le retrait de trois points sur le permis de conduire du conducteur, lorsque son véhicule n’est pas assuré. Parmi les peines complémentaires, encourues par l’auteur de cette même infraction, le législateur a prévu la confiscation possible du véhicule par le juge. L’article 5 de la présente proposition de loi prévoit également la possibilité de vente du véhicule, au profit du fonds de garantie automobile (FGAO), cité plus haut, qui contribue à financer l’indemnisation des victimes d’accidents, alors que l’auteur de l’accident n’était ni détenteur du permis, ni même assuré. En revanche, trop d’abus sont commis en matière de verbalisation, lorsque le conducteur n’a pas respecté le port de la ceinture de sécurité. En cas d’infraction, il est normal que le contrevenant encoure une sanction financière, puisqu’un tel comportement est susceptible de générer, en cas d’accident à faible vitesse, des frais de santé. Mais toutes les études démontrent que la ceinture de sécurité, à forte vitesse, ne constitue plus une garantie de protection efficace, en cas d’accident. C’est pourquoi il paraît injuste, et sans effet, de maintenir la sanction supplémentaire qui consiste à supprimer des points du permis, en cas de non port de la ceinture de sécurité : c’est précisément l’objet de l’article 2. Rappelons que le suicide ne constitue pas une infraction en droit français. En effet, la véritable dangerosité du comportement des automobilistes se manifeste ailleurs. Dans son bilan 2007, l’Observatoire national interministériel de sécurité routière démontre, chiffres à l’appui, que les accidents de la route, et leur gravité, ont désormais pour cause principale la vitesse sur les routes en rase campagne (un des grands facteurs de décès étant les objets fixes, tels que les arbres et les poteaux), la vitesse en période d’intempéries, et la vitesse de nuit. C’est donc là que notre politique de sécurité routière doit concentrer tous ses efforts, notamment si l’on veut relever le grand défi, lancé par le président de la République, de moins de 3 000 morts par an à l’horizon 2012. Ainsi, bien qu’elle ne représente que 10 % du trafic total, la période nocturne génère 34,3 % des blessés et 44,7 % des tués sur la route. La proportion avec le jour reste sensiblement la même, qu’il s’agisse du week-end ou de la semaine. Afin d’être plus justes et efficaces dans la politique de sécurité routière que nous menons, il convient donc d’être beaucoup plus fermes sur le respect des limitations de vitesse, en période nocturne. C’est pourquoi, l’article 3 précise que le conducteur qui circule la nuit doit réduire sa vitesse dans les mêmes conditions qu’en temps de pluie ou de brouillard, par référence à l’article R. 413-17 du code de la route qui lui impose une limitation de sa vitesse, lorsque les conditions de visibilité sont insuffisantes. C’est donc dans un souci de plus grande équité, en fonction de la gravité du délit réellement commis sur la route, et dans un souci de plus grande efficacité, dans notre politique de sécurité routière, que je vous prie de bien vouloir, Madame, Monsieur, adopter la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er Après l’article L. 223-8 du code de la route, il est inséré un article L. 223-9 ainsi rédigé :  « Art. L. 223-9 - Toute contravention résultant d’un dépassement de la vitesse maximale autorisée de moins de 5 km par heure ne peut pas donner lieu à une réduction du nombre de points du permis de conduire. « L’application de l’alinéa précédent entraîne la restitution immédiate des points retirés sur le permis de conduire des automobilistes, qui ont fait l’objet d’une telle sanction, sous réserve qu’ils se soient acquittés au préalable de l’amende forfaitaire correspondante, fixée par décret pris en Conseil d’État, en application de l’article L. 529 du code de procédure pénale. » Article 2 Après l’article L. 412-2 du même code, il est inséré un article L. 412-3 ainsi rédigé : « Le fait, pour tout conducteur, de ne pas porter la ceinture de sécurité, ne peut être sanctionné que par une amende dont le montant est défini par décret pris en conseil d’État. » Article 3 Après l’article L. 413-5 du même code, il est inséré un article L. 413-6 ainsi rédigé : « La vitesse de nuit sur l’ensemble du réseau est réduite dans des conditions définies par décret pris en Conseil d’État. Elle ne peut être supérieure à la vitesse limitée par temps de pluie. » Article 4 Dans le I de l’article L. 324-2 du même code, après les mots : « est puni de 3 750 euros d’amende » sont insérés les mots : « et le retrait de trois points du permis de conduire ». Article 5 Le II de l’article L. 324-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé : « 8° - La vente du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire. Le fruit de la vente est reversé au profit du fonds de garantie automobile institué par l’article L. 420-1 du code des assurances. » Article 6  L’article L. 211-1 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :  « Les contrats d’assurance couvrant la responsabilité mentionnée aux premier et deuxième alinéas du présent article continuent à produire leurs effets, jusqu’à leur date d’échéance, lorsque l’assuré a perdu la totalité des points de son permis de conduire, dont plus de la moitié en application du 4° du III de l’article R. 413-14 du code de la route. » Article 7  Après l’article L. 211-7 du même code, il est inséré un article L. 211-7-1 ainsi rédigé :  « Art. L. 211-7-1. - À la date d’échéance du contrat, et au moment de son renouvellement, l’assureur vérifie auprès de l’assuré que celui-ci est toujours titulaire du permis de conduire. Il lui demande, simultanément au versement de la prime ou de la cotisation, la production d’un certificat de détention du permis de conduire, établi depuis moins d’un mois par la préfecture de son département de résidence. »