Les interventions en séance

Droit et réglementations
Yves Détraigne 09/04/2013

«Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe-Article 1er»

M. Yves Détraigne

L’article 1er, sur lequel nous devrons nous prononcer dans quelques instants, est présenté comme un article tout simple, prenant acte de l’amour unissant deux êtres et visant à le consacrer devant la République. Cet article n’évoque ni l’adoption ni les enfants. Sauf que l’adoption sera abordée quelques articles plus loin. De plus, la PMA et la GPA suivront inévitablement dès lors que nous aurons admis que le mariage, tel que nous le connaissons aujourd’hui, peut aussi bien unir deux personnes du même sexe. Vous ne pourrez en effet pas empêcher qu’un couple marié de femmes ou d’hommes ayant eu recours à la GPA dans un pays qui reconnaît cette pratique revienne avec l’enfant. Certes, nous ne donnerons pas de papiers d’identité français à cet enfant, mais un jour ou l’autre il faudra bien régulariser sa situation ! Il serait intenable que des bébés, des enfants, de jeunes adultes et des adultes dans notre pays depuis leur tendre enfance et ayant de facto des parents français, ayant été à l’école ici, travaillant ici, ayant leur réseau de relations ici, ne puissent bénéficier de papiers d’identité français ! Inévitablement, nous serons donc amenés à reconnaître à la fois la PMA puis, au nom du principe d’égalité, la GPA. En effet, dès lors qu’un couple de femmes pourrait accéder à la PMA dans un autre pays et en revenir avec un enfant, pourquoi un couple de deux hommes ne pourrait-il pas demander de recourir à la GPA ? Voilà la faiblesse de ce texte ! Chers collègues de la majorité, nous voulons bien croire en votre bonne foi lorsque vous dites qu’il s’agit simplement de reconnaître officiellement l’amour que se portent deux êtres, indépendamment de leur sexe. Cet aspect ne nous pose pas problème, et les amendements en faveur d’une union civile vont d’ailleurs dans ce sens. Mais, au nom du principe d’égalité, qui est le seul argument invoqué pour justifier le projet de loi, quel que soit l’angle d’attaque, on en viendra à la GPA et à la PMA. On ira donc bien au-delà de ce qui a été annoncé à l’origine, à savoir la reconnaissance de l’amour que se portent deux adultes. Voilà pourquoi je maintiens que l’on ne nous dit pas tout sur ce texte ! (Protestations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.) Voilà pourquoi, au nom du principe de précaution – même si le terme n’est pas bien choisi –, nous nous opposons à l’instauration d’un mariage qui serait la copie conforme du mariage traditionnel, qui, lui, a bien pour vocation d’unir deux adultes dans la perspective de fonder une famille qui accueille des enfants. Dès lors que c’est ce modèle qui est transposé à deux hommes ou à deux femmes, d’une manière ou d’une autre, la conséquence sera inévitable et, par conséquent, on nous trompe sur les dispositions qui nous sont aujourd’hui soumises. Pour cette raison et pour d’autres, qui ont déjà été évoquées et qui le seront de nouveau au cours de nos discussions, nous ne pouvons pas adopter ce que le Gouvernement nous propose. (Applaudissements sur certaines travées de l’UDI-UC et sur les travées de l’UMP.)