Les interventions en séance

Droit et réglementations
08/02/2011

«Projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, Commission mixte paritaire»

M. Jean-Paul Amoudry

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes ce soir saisis des conclusions de la commission mixte paritaire sur les dispositions de la LOPPSI restant en discussion. La commission mixte paritaire, qui s’est réunie au Sénat le mercredi 26 janvier dernier, nous propose un texte de compromis entre les positions de la Haute Assemblée et celles qu’ont défendues nos collègues députés. Nous l’avons vérifié tout au long de la navette parlementaire, plusieurs dispositions importantes du projet de loi ont reçu une interprétation bien différente au sein des deux assemblées. La commission mixte paritaire était donc un exercice difficile, au cours duquel notre rapporteur, Jean Patrick Courtois, dont je tiens à saluer le travail, a bien défendu les positions du Sénat. Parmi les sujets qui faisaient encore l’objet d’un débat entre les deux assemblées, je concentrerai mon propos sur trois d’entre eux, qui ont d’ailleurs donné lieu à des discussions plus nourries lors de la commission mixte paritaire : les peines planchers, l’augmentation des peines de sûreté et, enfin, la poursuite de mineurs directement devant le tribunal pour enfants. Le texte que nous examinons institue des peines planchers pour les auteurs de violences aggravées, en l’absence de toute récidive, et c’est bien là la principale innovation. Le texte adopté par le Sénat, tant en première qu’en deuxième lecture, avait limité le champ d’application de cette peine minimale aux cas les plus graves. En effet, nous n’avions retenu que les délits de violences volontaires aggravées, pour lesquels la peine encourue est égale à dix ans d’emprisonnement, et les délits commis avec la circonstance aggravante de violences, dès lors que la peine encourue est égale à dix ans. Dans ces hypothèses, la peine minimale, ou peine plancher, serait de deux ans. En outre, le Sénat avait subordonné l’application de la peine plancher à l’existence pour la victime d’une interruption de travail de quinze jours. Rétablissant le texte qu’elle avait voté en première lecture, l’Assemblée nationale avait retenu en deuxième lecture un barème de peines planchers qui avait vocation à s’appliquer à des infractions moins graves, au moins du point de vue du quantum de la peine. En effet, les députés souhaitaient appliquer ce mécanisme à des délits punis de trois ans d’emprisonnement. Par rapport au texte que nous avions voté en deuxième lecture, la rédaction adoptée par la commission mixte paritaire prévoit d’introduire un nouveau seuil pour certains délits punis de plus de sept ans d’emprisonnement, pour lesquels la peine d’emprisonnement ne pourra être inférieure à dix-huit mois. Les deux assemblées sont donc parvenues à un compromis que je trouve satisfaisant. Malgré tout, une partie des membres du groupe de l’Union centriste est toujours aussi sceptique sur le principe même des peines planchers appliquées à des primo-délinquants. Je tenais donc à rappeler à cette tribune la position de ces collègues, qui, en conséquence, sont défavorables au deuxième seuil introduit par la commission mixte paritaire. Le deuxième sujet que je souhaite aborder concerne l’allongement de la durée de la période de sûreté prévue pour les auteurs de meurtres commis à l’encontre de magistrats, policiers, gendarmes, gardiens de prison, ou de tout autre dépositaire de l’autorité publique. Sur l’article en question, la commission mixte paritaire a globalement retenu la rédaction de l’Assemblée nationale. Mais elle a également repris, et je m’en félicite, une précision importante introduite par le Sénat : seuls sont visés les meurtres commis en bande organisée. Les membres du groupe de l’Union centriste étaient attachés à la préservation de cette circonstance aggravante. À travers elle, il s’agit d’insister sur la gravité particulière de l’acte qui a été commis et qui justifie, par conséquent, une peine de sûreté alourdie. Je formulerai maintenant une remarque d’ordre terminologique, mais qui a son importance. En deuxième lecture, le Sénat a introduit la notion de « préméditation », en plus de celle de « bande organisée ». Cette notion avait vocation à remplacer celle de « guet-apens », mais elle a dû être supprimée, car elle ne fait pas partie des circonstances aggravantes prévues par la loi pour l’assassinat ou pour le meurtre. Le texte voté par le Sénat conduisait à retenir la préméditation comme une circonstance aggravante de l’infraction d’assassinat alors qu’il s’agit de l’un de ses éléments constitutifs. Cette imprécision avait été soulevée lorsque cette modification a été débattue dans cet hémicycle, mais elle avait été adoptée malgré tout. Il était donc indispensable que la commission mixte paritaire retienne une rédaction plus conforme à la rigueur du droit pénal. Enfin, le troisième sujet que je souhaite aborder concerne la poursuite de mineurs directement devant le tribunal pour enfants, sans passer devant le juge des enfants. L’Assemblée nationale a étendu le champ de cette procédure en prévoyant qu’elle peut s’appliquer dès lors que, d’une part, il n’est plus besoin de procéder à de nouvelles investigations sur les faits et, d’autre part, la justice dispose d’investigations sur la personnalité du mineur datant de moins d’un an. Nos collègues députés voulaient donc permettre au parquet de poursuivre un mineur devant le tribunal pour enfants à condition que des investigations complémentaires sur les faits ne soient pas nécessaires et que des investigations sur la personnalité de l’intéressé aient été accomplies moins d’un an auparavant. Le Sénat avait réduit cette durée à six mois, point de vue finalement retenu par la commission mixte paritaire, ce dont je me félicite. Nous arrivons ce soir au terme d’un long processus législatif. Il faut rappeler que le texte important sur lequel nous allons nous prononcer était attendu : la délinquance évolue sans cesse, et il est indispensable de continuer à adapter notre arsenal législatif, d’une part, aux nouvelles formes de criminalité et, d’autre part, aux nouveaux moyens technologiques dont doivent pouvoir disposer gendarmes et policiers. Pour ces raisons, une large majorité des membres du groupe de l’Union centriste votera en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)