Les interventions en séance

Economie et finances
01/12/2010

«Projet de loi de finances pour 2011, Mission Outre-mer»

M. Adrien Giraud

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Mayotte entre dans une nouvelle phase de son développement avec l’accession prévue, en avril 2011, de cette collectivité au statut de département d’outre-mer, en conséquence directe de la consultation populaire du 29 mars 2009.
Au mois d’octobre dernier, la discussion au sein de notre assemblée du projet de loi organique relatif au département de Mayotte m’a donné l’occasion de faire le point sur la situation actuelle de notre collectivité et sur les retards de son développement économique et social, avant d’aborder les questions relatives à l’organisation de ce 101e département de la République française.
Madame la ministre, les sociétés évoluent. Les besoins de Mayotte ne sont plus ceux d’hier.
Le Gouvernement a souhaité que la solidarité nationale continue de s’exercer au mieux des intérêts de cette collectivité qui a, encore aujourd’hui, le plus grand besoin d’un accompagnement fort de l’État dans cette phase importante de son évolution et de sa mise à niveau.
Madame la ministre, nous vous demandons, dans toute la mesure du possible, de prendre en compte, dans un premier temps, nos retards dans le domaine des infrastructures indispensables pour nos progrès à venir, à savoir les routes et voies de communications, les hôpitaux et dispensaires nécessaires à l’amélioration de la santé publique, le réseau d’assainissement, ainsi que – j’y reviens une fois de plus – la construction d’un « véritable » aéroport répondant, dans sa conception architecturale, aux attentes tant des élus que de la population.
Cette question devrait faire l’objet d’un nouvel examen permettant autant que possible de rapprocher les points de vue sur ce projet particulièrement important pour l’avenir de Mayotte. Il est évident, en effet, qu’un tel chantier doit se fonder sur un consensus aussi large que possible et ne pas susciter d’inutiles polémiques.
En dépit d’un cadre budgétaire national dont je connais toutes les contraintes, et malgré les efforts déjà accomplis par l’État afin de résorber nos retards de développement, je souhaite que soit octroyé à Mayotte un concours financier spécifique destiné à permettre aux communes de faire face aux lourdes charges de cette période de transition, jusqu’à l’installation, en 2014, de l’organisation départementale et en attendant, bien entendu, l’application progressive de la fiscalité locale, qui apportera aux municipalités les ressources nécessaires à leur fonctionnement.
Madame la ministre, il me semble indispensable qu’une formation adaptée soit apportée à plusieurs catégories de fonctionnaires qui sont, dès à présent, appelés à mettre en œuvre concrètement la départementalisation sur le plan administratif, technique et financier.
Par ailleurs, je souhaite appeler tout spécialement votre attention sur l’état du réseau routier de Mayotte, qui se compose de 90 kilomètres de routes nationales et de 139 kilomètres de voies départementales.
La direction de l’équipement est responsable de la gestion des routes nationales, pour le compte de l’État, et des routes départementales, pour celui de notre collectivité.
Ces routes ont été dimensionnées à une époque où le trafic routier était faible. Elles sont souvent détériorées et déformées faute de moyens d’entretien régulier, à la suite, notamment, des inévitables dégâts résultant de la saison des pluies. L’érosion est alors considérable : c’est pourquoi le réseau routier se dégrade rapidement. Et il faut tenir compte également de l’augmentation importante du trafic des poids lourds entre les principaux pôles économiques.
Quelques aménagements ont déjà été réalisés – je pense aux rocades de M’tsapéré en 2002 et de Passamainty en 2005 – pour désengorger ce trafic très intense.
Partant du constat que des besoins cruciaux perdurent à Mayotte, en particulier en termes d’infrastructures, le treizième contrat de projet État-Mayotte 2008-2014 a retenu comme son quatrième axe la mise en œuvre d’un aménagement équilibré du territoire par la création, l’amélioration et la sécurisation du réseau routier. Le coût prévu de cette action s’élève à 20 millions d’euros pour le réseau national, à la charge de l’État.
À la fin de cette année, un peu plus de 8 millions d’euros auront été consommés, soit la totalité des crédits ouverts entre 2009 et 2010. Il reste donc 12 millions d’euros à honorer pour les prochaines années. Je souhaite obtenir du Gouvernement toutes les assurances sur le respect de ces engagements si importants pour nombre d’entreprises locales, c’est-à-dire pour l’emploi des Mahorais.
S’agissant de la programmation routière, hors ouvrages d’art, concernant le réseau national, les montants d’autorisations d’engagement s’élèvent à 4 millions d’euros par an pour les trois prochaines années.
La dernière étude réalisée par le Centre d’études techniques de l’équipement d’Aix constate que les besoins d’entretien et de régénération du réseau de Mayotte sont de 15 millions d’euros afin, simplement, de réaliser les travaux nécessaires pour remettre et maintenir le patrimoine en état, sans en modifier les caractéristiques.
En ce qui concerne l’amélioration du réseau routier, les besoins sont estimés à 30 millions d’euros, dont un peu plus de 11 millions d’euros sont financés par le contrat de projet État-Mayotte. Près de 20 millions d’euros supplémentaires seront donc nécessaires afin de mettre le réseau routier en état.
Madame la ministre, je n’insisterai pas davantage sur l’état du réseau départemental : on peut évaluer à environ 35 millions d’euros les besoins d’investissements qui seront nécessaires au cours des prochaines années pour assurer la sécurité de ces routes et qui ne peuvent être financés par les communes mahoraises, faute de moyens.
Nous espérons que vous nous apporterez les éclaircissements nécessaires sur l’état actuel de ces dossiers, suivis avec une grande impatience à Mayotte. En effet, leur intérêt économique pour les entreprises rejoint les besoins de la population en termes de sécurité routière et d’amélioration des échanges de toute nature, tant à l’intérieur de la collectivité que dans ses relations avec l’extérieur, en particulier dans le domaine du tourisme.
En conclusion, il est évident que les Mahorais peuvent enfin, dans le cadre départemental, consacrer tous leurs efforts au développement économique, ainsi qu’aux progrès sociaux et culturels de notre collectivité.
La réponse apportée par les Mahorais lors de la consultation du 29 mars 2009 signifie également que le temps est désormais venu de tirer les conséquences de l’évolution politique récente, qui appelle bien évidemment de vigoureuses actions de « rattrapage » lancées et accompagnées par l’État.
Lors de la discussion budgétaire de l’an dernier, j’ai eu l’occasion d’appeler l’attention du Gouvernement sur nos priorités, car nous le savons bien, comme dit le proverbe, « Paris ne s’est pas construite en un jour ». Il s’agit néanmoins pour nous d’urgences économiques et sociales qui s’appellent éducation, modernisation foncière, logement. Je sais pouvoir compter sur la vigilance et l’engagement du Gouvernement pour relever de tels défis avec Mayotte.
Permettez-moi enfin de rappeler, une fois encore, que Mayotte a depuis longtemps formulé le vœu d’accéder au statut de région ultrapériphérique de l’Europe communautaire, au même titre que les actuels départements d’outre-mer.
Madame la ministre, les Mahorais attendent beaucoup de votre action. Je sais que vous aurez le souci de ne pas les décevoir. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)