Les débats

Sylvie Goy-Chavent, Olivier Cadic, Olivier Cigolotti 24/10/2017

«Débat sur la revue stratégique de défense et de sécurité nationale»

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Mme Sylvie Goy-Chavent . - La présence de l'armée sur le territoire national est appelée à durer : menace terroriste mais aussi enjeux migratoires, protection des frontières, des grands évènements sportifs... Or l'évolution récente de Sentinelle reste homéopathique : si l'armée de terre sort du surrégime, le totem des dix mille soldats demeure.  Au-delà des effectifs, le rôle même de l'armée en matière de sécurité intérieure est contestable. Doit-elle assurer des missions de police aux frontières ? Les forces de police et de gendarmerie sont à bout de souffle, et l'armée sert de palliatif ! L'opération Sentinelle devait être provisoire, comme l'état d'urgence... Or la menace terroriste se renforce chaque jour davantage, notamment avec le retour prévisible des djihadistes français. L'armée doit-elle se consacrer aux opérations extérieures ou renforcer la sécurité intérieure ? Réponse de Mme Florence Parly, ministre. - Chacun est dans son rôle lorsque l'armée apporte sa contribution aux forces de sécurité du ministère de l'intérieur. Savoir-faire et matériels spécifiques viennent en appui dans des situations particulières, comme la lutte contre les feux de forêt ou dans les Caraïbes après le passage de l'ouragan Irma ; la présence du bâtiment Tonnerre a été décisive. L'opération Sentinelle a fait débat. Des moyens importants ont été accordés à l'armée de terre qui a vu ses effectifs croître pour répondre aux besoins. L'efficacité des interventions des hommes et des femmes engagés dans Sentinelle se passe de long discours : leur présence est sécurisante et dissuasive, ils font face à la menace avec professionnalisme.  Nous ne mélangeons pas les genres. Les soldats ont aussi une mission de protection du territoire national.

Mme Sylvie Goy-Chavent. - Merci, mais j'attire l'attention sur l'état d'épuisement de nos forces armées qui se dévouent pour défendre nos valeurs et protéger nos vies.
  M. Olivier Cigolotti . - Deux axes contradictoires ressortent de la revue stratégique : un enjeu sécuritaire et une concomitance des menaces qui épuise nos armées. Les matériels sont anciens : nos véhicules de l'avant blindés (VAB) ont 31 ans d'âge moyen... La situation est particulièrement tendue. Ne devrait-on pas concentrer les crédits sur le renouvellement des matériels plutôt que dépenser des sommes élevées en entretien ? Ensuite, comptez-vous tenir compte de cette revue stratégique dans la définition des OPEX ? Réponse de Mme Florence Parly, ministre. - L'usure des matériels est liée à leur utilisation, en particulier aux conditions qu'ils subissent au Sahel. Dans le projet de loi de finances pour 2018, une enveloppe particulière sera consacrée à la protection, pour régénérer des matériels, en particulier le blindage des VAB. Cela fait partie des priorités.

Comment le dispositif OPEX peut-il évoluer ? Nous n'envisageons pas la réduction de nos engagements à très court terme. Mais nos victoires au Levant appellent à revisiter le dispositif en lien avec nos alliés. Le président de la République nous a demandé d'examiner une éventuelle adaptation du dispositif au Sahel.
  M. Olivier Cadic . - La photo est émouvante : à Saint-Martin, après le passage d'Irma, un militaire porte une petite fille endormie dans ses bras ; pourtant, l'image a provoqué une polémique, où l'on a accusé l'armée de « propagande », voire et même de « néocolonialisme ». Chacun sait, aussi, dans un autre registre, le peu de réalité que recouvrent les articles sur les prétendus avantages exorbitants et le train de vie des sénateurs. Pour autant, ces fausses informations ont une incidence et nous montrent que, quels que soient les efforts entrepris contre les cyberattaques, ils resteront sans effets réels s'ils ne sont pas complétés d'une stratégie de contre-influence. Les sociétés européennes sont perméables à la propagande djihadiste, mais aussi aux actions menées par des puissances étatiques de premier rang qui manipulent les campagnes électorales, on l'a vu aux États-Unis. Le Pentagone estime que les réseaux sociaux sont la plus grande menace militaire actuelle. Je m'étonne que la revue stratégique n'en parle pas. Madame la ministre, quelle stratégie de contre-influence comptez-vous mettre en oeuvre ? Réponse de Mme Florence Parly, ministre. - Les réseaux sociaux sont le premier vecteur de diffusion du terrorisme. L'espace numérique est un espace de combat. Aujourd'hui, des moyens croissants sont consacrés au cyber. Le Service d'information du gouvernement scrute quotidiennement les informations qui circulent. Nous demandons aux fournisseurs d'accès l'origine de la diffusion de fausses informations. Je n'ai pas une réponse complète, je l'avoue. Si nous l'avions, nous pourrions contrer ces attaques. M. Olivier Cadic. - « Pour gagner une guerre, mieux vaut un bon général, que deux mauvais ! » disait Napoléon - mais face aux fake news, nous n'en avons aucun !