DANS LES MÉDIAS

LE FIGARO : "Au Sénat, le grand casse-tête des groupes"
Jean-Marie Vanlerenberghe 26/09/2017

Les résultats de dimanche n'ont pas modifié les grands équilibres mais les tractations ont débuté en coulisses.

Galiero, Emmanuel, Siraud, Mathilde
ÉLECTIONS  Le scrutin passé, de nombreuses inconnues subsistent sur la nouvelle composition du Sénat. La question de la constitution des groupes politiques, notamment, ainsi que l'application de la loi sur le non-cumul vont considérablement transformer le visage de la Haute Assemblée. Ceux qui siègent au Palais du Luxembourg et détiennent un mandat exécutif local vont devoir faire un choix, faisant bouger à la marge les équilibres politiques. À ce stade, rien n'est encore stabilisé. L'exécutif suit de près les mouvements à venir.  « Même si le Sénat est majoritairement à droite, veut-il être le fer de lance des Républicains ou accepte-t-il de remplir un rôle de construction positive vis-à-vis du gouvernement ? »  , s'interroge André Gattolin, sénateur réélu dimanche dans les Hauts-de-Seine avec l'étiquette LREM. Les macronistes, qui ambitionnaient de faire grossir leur groupe - de 27 élus - en recrutant parmi des socialistes Macron-compatibles et des centristes, semblent faire machine arrière.  « J'étudie les listes, je recense partout, mais je ne vois pas trop quelles sont nos marges de manoeuvre , reconnaît François Patriat, président du groupe LREM.  Les centristes et les socialistes considèrent désormais qu'ils sont dans des groupes ascendants. »  Marie-Noëlle Lienemann, réélue sénatrice PS, le confirme :  « Il y a de moins en moins de soutiens à la majorité dans nos rangs. Ce n'est plus la mode ! »  Au cours des prochains jours, les tractations vont s'intensifier entre les sénateurs. Les réunions qui ont lieu ce mardi matin dans chaque groupe auront une tonalité toute particulière et devront fixer une stratégie pour la suite. Après des résultats  « très moyens »  - selon leur propre aveu -, les sénateurs macronistes seront particulièrement scrutés.  « Cet équilibre composite au Sénat peut nous permettre une plus grande discussion. En vue des réformes constitutionnelles, on peut s'allier intelligemment avec des partenaires. On pourra par exemple proposer aux centristes, aux Constructifs s'ils font un groupe, aux RDSE et à d'autres un contrat de majorité présidentielle. L'accord ne durera peut-être pas sur l'ensemble de la mandature mais on pourrait par exemple s'entendre sur le redressement économique du pays »  , estime André Gattolin. Réélu dans le Pas-de-Calais avec l'investiture LREM, Jean-Marie Vanlerenberghe siégera au sein du groupe de l'Union centriste.  « Je suis contre l'idée d'un parti godillot et ne suis pas sûr que ce soit la meilleure option pour aider Emmanuel Macron »  , se défend-il.  Autre conséquence des résultats du scrutin de dimanche : la prudence des Constructifs.  « Ils ne veulent plus faire de groupe, ils sont en train de reculer compte tenu des scores de LREM »  , raconte un sénateur centriste. Pourtant, les appels téléphoniques étaient nombreux, lundi, entre Constructifs. Certains semblaient très optimistes quant aux possibilités de voir émerger un groupe «  évolutif » de quatorze sénateurs sur les fondations de l'association « République et territoires, Les Indépendants » , présidée par le sénateur de l'Allier, Claude Malhuret. Lequel se dit certain - « à 95 % »  - d'atteindre le minimum de dix signatures nécessaires à la composition d'un groupe.  «  Cela devrait se décider mardi. Nous attendons qu'une partie des sénateurs arrivent à Paris pour nous réunir  » , confie Colette Mélot, sénatrice de Seine-et-Marne. Elle ne cache pas son intérêt pour un groupe «  libre et indépendant » , composé d'élus «  libéraux, humanistes et européens » . Jérôme Bignon (Somme), Alain Marc (Aveyron), Emmanuel Capus (Maine-et-Loire), François Commeinhes (Hérault) partageraient la même vision.  Pour sa part, Fabienne Keller (Bas-Rhin), se montre plus prudente. Elle évoque l'existence d'un débat interne sur la manière la plus efficace de peser. Selon elle, les élus locaux sont aujourd'hui «  un point de fragilité » car beaucoup sont vent debout contre Macron, notamment après ses annonces de juillet en faveur d'une baisse du nombre d'élus dans les territoires.  Dans un tel contexte de défiance, lassés par les divisions de la droite, certains sont plutôt tentés par une stratégie de consolidation du groupe LR, dont la présidence devrait revenir à Bruno Retailleau. Sans compter que le président LR Gérard Larcher «  fait consensus sur les bancs du Sénat » , affirme Fabienne Keller. «  Mais elle n'est pas la représentante de toutes les sensibilités du Sénat  » , nuance un proche du sénateur François Commeinhes, séduit par la perspective d'un groupe «  indépendant » ayant vocation à s'élargir.  En vérité, les Constructifs du Sénat calent leur développement sur les évolutions du parti Les Républicains. Leur positionnement «  anti-Wauquiez » n'est pas un mystère et beaucoup pensent que la victoire d'un courant «  conservateur » à la tête des LR provoquera des ralliements vers les Constructifs du Sénat. «  Il y a des valeurs auxquelles nous croyons. Nous pouvons porter un regard différent sur certains projets de loi, voter ce qui va dans le bon sens et être vigilants sur le reste » , avertit la sénatrice Colette Mélot, ex-soutien Bruno Le Maire lors de la primaire de la droite et du centre.