DANS LES MÉDIAS

LES ÉCHOS : "La simplification des normes relancée par les collectivités et l'Etat
Jean-Marie Bockel 07/08/2017

Si le coût du flux de normes a été contenu en 2015, il a connu une nouvelle dérive l'an dernier.  Les élus locaux exigent un renforcement du pouvoir du Conseil national d'évaluation des normes.

MATTHIEU QUIRET
La norme est le gibier préféré des élus locaux et la chasse est à nouveau ouverte. Le Premier ministre en a donné le coup d'envoi, il y a quelques jours, via une circulaire applicable au 1er septembre. Le mot d'ordre est martial, appelant le législateur à compenser toute nouvelle norme réglementaire  « par la suppression ou, en cas d'impossibilité avérée, par la simplification d'au moins deux normes existantes » . Pas de quoi rassurer les spécialistes du sujet, pour lesquels une circulaire ne suffit pas à mettre l'administration au pas.  Mais le mot d'ordre d'Edouard Philippe pourrait endiguer la nouvelle dérive des coûts des normes constatée l'an dernier. Le rapport 2017 du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) indique que l'an dernier, l'instance pilotée par les élus locaux et l'Etat a examiné 36 % de normes de plus qu'en 2015 (544 textes), générant des charges nettes de 5,4 milliards d'euros. Un pic qui tranche avec l'année 2015, qui avait vu les coûts et les économies générées par les normes s'équilibrer pour la première fois. Cette année de modération avait résulté directement des engagements pris par Manuel Valls à Matignon, en octobre 2014, et de la mobilisation de son ministre André Vallini. L'effort était retombé en 2016 à cause de la loi sur l'isolation thermique des bâtiments tertiaires et les mesures sociales en faveur des agents publics (PPCR).  Un dada de Gérard Larcher Antoine Homé, maire socialiste de Wittenheim et représentant de l'Association des maires de France au CNEN, reconnaît que le précédent gouvernement avait calmé le jeu après les grandes vagues de décrets, liées notamment au Grenelle de l'environnement. Mais, pour lui, le risque reste important :  « Il y a trop de lois de plus en plus détaillées. Et dans notre système centralisé unique en Europe, l'Etat impose des dépenses qu'il ne paie pas. » Il donne pour exemple récent le transfert de la délivrance des passeports aux mairies.  « Depuis, dit-il,  ça n'a pas changé, le CNEN vient d'examiner le texte sur la simplification administrative. » Pour lui, il s'agit de réduire la production législative mais aussi d'imposer l'avis conforme du CNEN comme condition d'adoption d'un texte. Enfin, davantage de décentralisation permettrait, selon Antoine Homé, d'aligner le décideur et le payeur.  La pression antinorme de ces dernières années n'a pas été sans résultats, en particulier grâce à l'action du Sénat et de son président, Gérard Larcher, qui en a fait un de ses dadas. La délégation aux collectivités territoriales revendique au moins une quinzaine de mesures de simplification entrées en vigueur au 1er juin 2017 (lire ci-contre). Pour le président de la délégation, Jean-Marie Bockel, la priorité est maintenant de renforcer les études d'impact des normes, en les confiant à un organisme indépendant comme dans d'autres pays européens.  « Elles sont faites actuellement par l'administration », déplore le sénateur centriste du Haut-Rhin qui poursuit :  « Les impacts étudiés sont trop juridiques, il faudrait regarder les effets économiques et sociaux. »  Il plaide aussi pour une culture de l'évaluation des textes et des clauses de revoyure à l'anglo-saxonne. Le Sénat a sondé plusieurs fois les maires sur les normes les plus urgentes à supprimer, suscitant plus de 16.000 réponses.  « La priorité, pour eux, reste les textes sur l'urbanisme », rappelle Jean-Marie Bockel, qui ne souhaite pas pour autant une remise en question de l'utilité des normes :  « Les élus locaux peuvent avoir des demandes radicales, par exemple sur les règles contraignantes des architectes des Bâtiments de France. Heureusement que la construction reste encadrée. »  Au gouvernement, un expert juge de son côté que la simplification des normes offre des économies possibles, mais sans en être la source principale. Tout en soulignant un paradoxe :  « La société réclame des normes pour être mieux protégée. »